SALAMSTREET

Le magazine internet allemande "Dw-world.de" a consacré un interview à Mohamed Drissi Bekhkhat l´un des grands noms de blogueurs marocains ( et le créateur du blog Motic) -qu´on regrette d´ailleurs- dont voici la traduction en francais:

DW-World.de:
Monsieur Drissi Bekhkha, comment jugez-vous l´affaire de Fouad Mourtada?

Drissi Bekhkhat:
comme il a été rapporté par la presse et la famille Mourtada, Fouad a avoué avoir créer un profil au nom du prince moulay Rchid, sans vouloir l´utiliser à des fins douteuses; les autorités, quant à elles n´en sont pas convaincu. elles montrent, encore une fois de plus, que les questions des nouvelles technologies au Maroc sont traitées avec une grande maladresse. le Maroc, par exemple, est le seul pays au monde à avoir interdit l´accès à Google Earth et les photos satellites de Google Maps.
personnellement, je ne comprends pas quelles en seraient les conséquences pour la sécurité du? si on sait que, malgré tout, on peut avoir accès à ces photos.
de ce qui est de l´affaire Mourtada, il aurait été plus simple d´interdire Facebook, supprimer le profil et contacter son créateur pour lui faire part que créer un tel profil est toléré dans un autre pays du monde, mais les choses sont différentes au Maroc.
on doit aussi se le rappeler que les autorités ont obtenu des aveux de Mourtada après une longue séance de tortures; et tout ce qu´on a pu retenir contre lui est le fait d´avoir créer un faux profil.
les autorités publiques devraient, entre autres, faire preuve de "zèle" dans d´autres affaires plus importantes pour la société comme la corruption par exemple.

C´est quoi qui vous a amené a avoir cette opinion après l´arrestation de Mourtada?

il est trés difficile de donner une explication rationnelle à cette réaction démesurée. la presse a rapporté sur l´existence d´un profil Facebook au nom du roi du Maroc, ceux qui connaissent ces pages lá, savent aussi que ça ne peut s´agir que d´un faux profil. il est possible que les autorités veulent montrer que ces faux profils ne sont pas tolérés; et on ne sait pas comment ils sont arrivées à tracer Fouad: est-ce que Facebook et/ou le Provider internet marocain les ont aidé?
on ne doit pas oublier que n´importe qui dans le monde peut encore ce genre de profils, et que les autorités pourront avoir l´effet négatifs, vu leurs réaction, que cette sorte de profils se multiplieront. ça me rappelle l´affaire de youtube en 2007; l´interdiction , qui a été levée après les protestations des internautes, n´a mené qu´à rendre deux vidéos insultantes pour le Maroc qu´encore plus célèbres.

est-ce qu´on peut considérer que la réaction de l´autorité envers l´affaire de Mourtada est une réaction symptomatique chez cette même autorité envers internet?

En outre, il y a eu la censure de Google Earth depuis 2006 et Google Maps depuis l´été 2007; et ceux qui voulaient allaient sur ces pages, devraient avoir des "tools" nécessaires avec lesquels peuvent surfer anonymement, pour ne pas être repérer facilement.
quand youtube a été interdit ça n´a rendu des vidéos insultantes pour le Maroc qu´encore plus célébrés et ça attire la curiosité des internautes. l´affaire Mourtada a attiré l´attention sur la justice au Maroc; et le Maroc n´a rien à gagné quand il traite de telles affaires de cette façon, au contraire, il perds beaucoup de ce qui faisait l´essentiel de son image.
il n´y a pas trés longtemps de ça, la presse louait la liberté sur internet et la richesse de la blogosphére marocaine, la plus active dans le monde arabe; tout ça est maintenant, avec l´affaire de Mourtada, du passé.
j´ai moi-même un blog qui se consacre aux nouvelles technologies. il était pour moi une possibilité, aussi, de protester contre la censure internet au Maroc, j´ai toujours critiqué ouvertement les décisions du gouvernement et la censure qu´il soit à internet ou à télévision. Mais après l´affaire Mourtada, je me suis décidé d´arrêter d´alimenter ce blog, car je ne crois plus que l´opinion des blogueurs interesse le pouvoir politique marocain. J´interprète l´affaire de Mourtada comme la fin de liberté internet au Maroc.

paru dans Dw-World.de du 26.02.2008
interviewé par sarah Mersch
traduit par mousti